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Sénégal
Justice et Etat de Droit

Justice et Etat de Droit
© FNF Westafrica

Chaque époque est dominée par une notion maîtresse qui détermine les rapports sociaux, façonne l’organisation politique, l’ordre juridique et la conscience sociale. L’État de droit remplit aujourd’hui cette fonction et a pu développer son emprise avec le déclin des autres systèmes.

L’État de droit, selon la conception dominante, repose sur une vision globale de la société et une formidable prétention qui donneraient au droit vocation et aptitude à organiser la vie en société et contrôler entièrement l’ordre social. Il s’agit d’un ordre juridique permettant le contrôle du pouvoir et, partant, la protection de la dignité humaine.

Tout discours sur l’État de droit requiert la présentation d’un catalogue de principes, de droits et de techniques juridiques (primat et autorité de la loi, principe de légalité, égalité des sujets de droit, contrôle de constitutionnalité, etc.), et définit la relation entre le pouvoir et l’individu par le médium du droit qui constitue l’instrument privilégié, voir même exclusif de régulation de l’organisation politique et sociale. Une telle société se caractérise par la soumission de tout au droit qui régit et investit tous les secteurs.

L’Etat de droit est aujourd’hui considéré comme la principale caractéristique des régimes démocratiques et la justice doit en être le garant. En définitif, il est destiné à la mise en œuvre de l’esprit de justice. Le principe de l’État de droit suppose l’existence de juridictions indépendantes et compétentes pour trancher les conflits entre les différentes personnes juridiques, en appliquant à la fois le principe de légalité, qui découle de l’existence de la hiérarchie des normes, et le principe d’égalité devant la loi qui s’oppose à tout traitement différencié des personnes juridiques.

Un tel modèle implique l’existence d’une séparation des pouvoirs et d’une justice indépendante et crédible. Il convient alors de relever le défi lié au problème récurrent des menaces à l’Etat de droit et à la Justice, notamment en Afrique. En effet, la Justice faisant partie de l’État, seule son indépendance à l’égard des pouvoirs législatif et exécutif est en mesure de garantir son impartialité dans l’application des normes de droit.

Pilier fondamental de l’Etat de droit, la Justice est devenue un élément incontournable de la paix, de la stabilité et du développement d’un pays. En effet, les peuples exigent de plus en plus de protection contre les abus, l’arbitraire et les agressions de toute nature.

Par ailleurs, les juridictions doivent être en mesure de confronter les différentes normes, afin de juger de leur légalité, y compris s’il s’agit de règles ayant un rang élevé dans la hiérarchie. C’est le cas des conventions internationales qui, en vertu de l’article 98 de la Constitution du Sénégal, ont une primauté sur le droit interne.

Pourtant, le constat est que les juridictions africaines appliquent peu les normes internationales dans le règlement des litiges. Il convient alors de poser le débat légitime sur l’introduction de ces instruments internationaux dans les corpus juridiques internes des Etats africains.

Comment ces normes internationales peuvent-elles intégrer l’ordre juridique interne de ces Etats ? Quelles sont leurs conditions d’applicabilité en droit interne ? Quelle est la place de ces normes dans le règlement des litiges en Afrique ? Quel est le mécanisme applicable ? Comment développer une culture d’ouverture des juges et des avocats aux normes et instruments internationaux ?

Il s’agit de relever le défi de la domestication du droit international qui passe nécessairement par le renforcement des capacités des membres de la famille judiciaire et la promotion d’un dialogue judiciaire. Ce dernier se traduit par le partage de la jurisprudence et des connaissances entre systèmes juridictionnels. En effet, à l’ère de la mondialisation et de la mutation numérique, rapprochant davantage les peuples, une justice sans frontière s’impose davantage. Cette nouvelle dynamique interpelle les juges et les avocats qui ne peuvent plus se cloîtrer dans leurs corpus juridiques nationaux.

Conscients de la nécessité d’introduire les normes internationales dans les corpus juridiques des Etats en Afrique pour une cohérence de la gouvernance judiciaire et un renforcement de l’Etat de droit, la Cour Suprême du Sénégal, la Fondation Friedrich Naumann pour la Liberté (FNF) et la Fondation René Cassin, Institut International des Droits de l’Homme (FRC), en partenariat avec l’Ambassade de France et la Délégation de l’Union Européenne (DUE) au Sénégal, ont organisé cette session de formation sur « Justice et Etat de droit », afin d’offrir aux magistrats des cours et tribunaux, aux avocats et aux auxiliaires de justice la possibilité de mieux se familiariser avec les instruments juridiques internationaux et régionaux ainsi que les mécanismes de surveillance pour leur application effective.

La session s’articulait autour d’une série de cours fondamentaux, des séminaires spécialisés portant sur des thématiques intéressant particulièrement les juridictions nationales des Etats en Afrique, des cours thématiques et des conférences spéciales.

Justice et Etat de Droit
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